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Festivals/ Piano aux Jacobins - Joaquín Achúcarro
5 septembre
2018 |
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CRITIQUE
Chopin révélé par Joaquin Achúcarro
Le 5 septembre s’est ouverte la 39ème édition du Festival International Piano aux Jacobins. Voici en effet 39 années que la fête toulousaine du clavier marque le début de la riche saison musicale de la ville rose. Tout en poursuivant son évolution, le Festival maintient le cap de ce qui fait sa force et son identité : la coexistence entre le prestige des artistes consacrés et l’ouverture vers la jeune génération. C’est l’un des grands habitués de Piano aux Jacobins qui débutait cette rencontre entre les générations d’artistes, le grand Joaquín Achúcarro.
Comme pour célébrer son 85ème anniversaire, le prestigieux interprète espagnol retrouvait l’un des compositeurs les plus emblématiques de son instrument, Frédéric Chopin. Ce soir-là, le choix des œuvres qui composent son récital semble obéir à une exigence particulière. La première partie de cette belle soirée est consacrée aux 24 Préludes de l’opus 28. Joaquin Achúcarro ne se contente pas d’égrener ces vingt-quatre pièces courtes (entre 30 secondes et 5 minutes), écrites chacune dans une tonalité différente en suivant le cycle des quintes, chaque tonalité majeure étant suivie de sa relative mineure. Il s’en explique au micro en introduction. La succession de ces Préludes procède pour lui d’une architecture élaborée et délibérée. Il ne s’agit donc pas d’une simple succession de pièces indépendantes, brillantes ou intimes, mais bien plutôt d’un ensemble structuré, une sorte de grande sonate en vingt-quatre mouvements. |

Le grand pianiste basque espagnol Joaquín Achúcarro |
Et c’est bien ainsi qu’il en développe le déroulement. La continuité qu’il établit entre chaque épisode confère à l'œuvre son unité organique. Le pianiste s’appuie souvent sur la résonance du dernier accord d’une pièce pour enchaîner avec la suivante. Son jeu, rigoureux mais sans austérité, droit et digne, restitue avec finesse les états d’âmes qui caractérisent chaque élément de ce puzzle musical. Le Chopin de Joaquín Achúcarro ne cède jamais à l’excès de pathos, à une quelconque facilité ou sensiblerie. L’affectation ne fait pas partie de son approche du compositeur. Elégance et pudeur n’empêchent en rien ni la révolte ni la tendresse, ni la souffrance ni l’apaisement. Tels qu’ils nous sont révélés par l’interprète, ces Préludes montrent un nouveau visage du compositeur.
La seconde partie de la soirée, elle aussi admirablement construite, s’écoute comme une œuvre en soi. Elle s’ouvre sur les deux autres Préludes composés par Chopin, l’ut dièse mineur op. 45 et l’opus posthume. A la fluidité pleine de charme du premier succède le rêve évoqué par le second. Dans la Fantaisie-Impromptu en do dièse mineur, qui suit ces deux courtes pièces, le pianiste déploie toute la richesse de son engagement musical. L’énergie virtuose (jamais gratuite) se mêle ici au pouvoir expressif avec une ferveur admirable.
Les deux Nocturnes, l’opus 9 n° 2 puis le célèbre opus posthume (en do dièse mineur) constituent une halte paisible d’une poésie extrême. Comme s’il s’agissait du mouvement lent d’une sonate nouvelle. La Barcarolle opus 60, telle un Scherzo, déroule son rythme « gondolier » entourant l’épisode central aux accents épiques.
C’est avec probablement la plus célèbre des œuvres pianistiques du répertoire que se conclut ce programme. La Polonaise n° 6 opus 53 mérite bien son sous-titre d’« Héroïque ». Joaquín Achúcarro s’y investit avec une force de conviction, un engagement sans faille. La flamboyance de la virtuosité digitale ne masque en rien le sens des nuances, la construction de crescendos irrésistibles ni l’élan de révolte qui sous-tendent la pièce. L’orage qui éclate alors sur la ville semble mis en scène en accord parfait avec la pièce. Il en est de même de la chauve-souris effrayée qui vient se donner en spectacle autour de l’interprète ! Les éléments se mêlent ainsi à la musique…
L’ovation enthousiaste qui accueille cette (provisoire) conclusion rappelle l’interprète qui décide d’un hommage à « Claude de France » dont il joue le fameux et rêveur « Clair de lune ». La soirée s’achève sur une véritable performance à la fois technique et expressive. Joaquín Achúcarro joue le Nocturne opus 9 n° 2, pour la main gauche, d’Alexandre Scriabine. Une stupéfiante leçon de piano et de musique.
Serge Chauzy
Article mis en ligne le 7 septembre 2018
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infos |
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Réservations par téléphone :
05 61 22 40 05
par Email :
contact@pianojacobins.com
ou sur le site internet :
www.pianojacobins.com.
Ouverture de la billetterie :
Pour les abonnements, à partir du 2 mai
Pour les places à l’unité, à partir du 9 mai
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Programme du concert donné le 5 septembre 2018 à 20 h dans le cloître des Jacobins de Toulouse
* F. Chopin
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24 Préludes op. 28
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Prélude op. 45
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Prélude op. posth
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Fantaisie –impromptu op. 66
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Nocturne op. 9 n° 2
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Nocturne en do dièse mineur op. posth.
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Barcarolle op. 60
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Polonaise n° 6 op.53 « Héroïque » |
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